mardi 20 octobre 2009

Avec l'aimable autorisation d'Emmanuel Roudier.

Espèce de préface - si je puis me permettre !- explicative.

Voici une fanfic inspirée par le méchant de la saga de BD remarquable d'Emmanuel Roudier, Néandertal, Feydda le Rusé. Une autre fanfic, qui ne sort pas du cadre de l'histoire a déjà été publiée sur son site, mais celle-là dérive un peu trop de l'évolution qu'il voulait donner à son personnage, alors il m'a permis de la publier ici. Voici d'ailleurs ce qu'il m'en a dit et ma réponse :
Waouh ! qu'est-ce qu'il prend, Feydda ! Tu lui fais faire les montagnes russes ! blague à part j'ai trouvé ton histoire bien tournée, une fois encore, et on se dit que ça pourrait faire une prémice à une histoire plus complète. Il y a un truc qui est bizarre dans ta façon d'écrire, c'est que tes passage narratifs sont très bien écrits, parfois âpres, parfois poétiques, toujours bien rythmés, mais tes dialogues sont toujours à la limite du burlesque... Des fois ça fait un peu comme si les bronzés jouaient dans la Guerre du Feu, c'est étrange. En tous cas ta femme sanglante qui fait du kung fu est un personnage sympathique et il y a dans ton texte de très jolis passages. Pour le coup, je ne vais pas le publier sur le blog parce que la direction que prend ton récit est vraiment très éloignée de celle que je vais prendre moi-même, et je ne voudrais pas que ta nouvelle influe, d'une certaine manière, sur la perception qu'auront les lecteurs de Feydda dans le tome 3 ! Mais je te remercie de m'avoir envoyé ce texte et si tu souhaites le publier sur ton blog, bi maille guaiste, chère Tinky !
Amicalement
Et j'apprécie ce courrier, car il me permettra d'améliorer mon style au niveau des dialogues... En effet, j'ai un peu trop tendance à écrire les conversations comme je parle moi-même et mon franc-parler de personne du Sud-Ouest donne aux dialogues effectivement un côté assez peu en adéquation avec un récit sérieux. Mais voici ma réponse :
Salut, Manu !
D'accord ! Merci pour ton appréciation ! En fait, mes dialogues, j'avoue, pèchent un peu, parce qu'en fait, je trouvais assez fou que ce pauvre type mal barré de Feydda se retrouve retourné comme ça !
Et j'ai voulu un peu dédramatiser la chose, aussi ! Mais il est vrai que le pauvre gars, je ne l'arrange pas vraiment... Mais je n'arrive pas à le trouver complètement mauvais non plus. Aurais-je loupé une vocation de psy, d'avocate ou d'assistante sociale ?
Pour moi, il me semble que ces gens avaient tout comme nous des personnalités complexes, et que certains d'entre-eux, dont le pauvre Feydda, pouvaient être de grands tourmentés ! Nos propres Néanderthaliens, à Mimi et moi ont souvent de grandes tempêtes sour leurs crânes épais et fuyants ! Et nous les avons imaginés aussi largement allumés que leurs successeurs ! Mais dotés aussi d'un solide sens de l'humour, pensant que l'humour sauvait des pires situations, et qu'avec de la bonne humeur, on pouvait faire face à bien des choses !
Pourrais-je publier la chose en incluant ta lettre et ma réponse en introduction ? A mon avis, ça va en amuser plus d'un ! Disons que c'est une fanfiction déjantée. Mais je crois sincèrement qu'on peut sauver les pires situations avec de la compréhension et de l'amour, c'est un peu ce que je voulais exprimer à travers cette histoire.
Ravie qu'ele t'ait plu, et à bientôt !
Alors, voici le début de l'histoire où Feydda le Rusé connaît la rédemption grâce à l'amour !

Celle-Qui-Sait.



Vision.


La vieille femme se tenait, bien droite et digne, et la regardait de ses yeux étincelants, elle, Haraka du Clan de l’Aigle des Hommes Sanglants… La vieille Moussue qui détenait les secrets des médications les plus remarquables et un pouvoir énorme de guérison était morte dévorée par tout son clan, mais les malades n’étaient pas guéris pour autant, quant aux secrets de la vieille femme, rien n’avait transparu dans son esprit depuis que tous l’avaient mangée… Et là, elle revenait, ricanante, se gausser à grand bruit d’elle et de son peuple… Et on ne pouvait rien faire contre ça, elle était morte, et on ne pouvait tuer quelqu’un de déjà mort ! ! !
Mais les visions horribles continuèrent… La vieille femme avait attrapé sa main avec une force redoutable, d’une patte griffue inamovible, et l’entraînait dans le Territoire des Esprits ! Les Esprits en bas, du Monde Inférieur, toujours plus bas ! ! !
Et là, elle découvrit l’horreur… Tous les Hommes Sanglants, morts pour s’être sacrifiés volontairement à la survie des autres qui les avaient mangés pour acquérir leur puissance et leurs qualités, étaient là, soumis à des tortures abominables, dépecés sans cesse, car leurs corps se recomposaient sans arrêt et se recollaient, ce qui faisait que cette destruction recommençait encore et encore… Le pire, dans tout ceci, ce fut le message qu’ils lui transmirent :
«- Nous nous sommes trompés ! Cela fait des lunes et des lunes, des printemps et des printemps que nous nous trompons ! Les vertus de ceux que nous dévorons ne nous rendent pas plus forts ou plus intelligents… Ils n’accroissent pas notre prestige non plus… Vois, les Mauvais Esprits nous condamnent à vivre et revivre dans notre chair leurs supplices pour toujours ! Jamais nous n’irons dans les Territoires de Chasse des Grands Ancêtres sous l’égide du Grand Ours, de la Lune et de la Terre Mère ! Nous sommes coincés ici à tout jamais, et nous ne renaîtrons jamais, nous n’aurons jamais de seconde chance ! Réveille-toi, et va dire aux tiens qu’ils se trompent, que nous nous sommes affreusement trompés depuis des saisons et des saisons ! Allez, va !».
Haraka, horrifiée, échappa de la serre qu’était la main de la vieille chamane qui l’avait entraînée si bas… Et qui d’ailleurs s’était transformée en chouette et s’envolait à présent, bien loin au-dessus de ce monde infernal et horrible !
Il fallait qu’elle s’échappe de là ! Vite !
Et la proie d’une terreur sans nom, Haraka donna un grand coup de pied sur le sol, comme quand on veut remonter à la surface d’un lac ou d’une rivière profonde… Et elle s’envola loin de ce monde des Esprits Inférieurs, et revint sur le plan des simples mortels !
Son propre hurlement de terreur pure la réveilla… L’œil lumineux de la pleine lune l’accueillit, éblouissant, via le trou de fumée de la tente minable qu’elle habitait, à quelque distance de la tente des hommes et de celle des femmes.
Elle était la seule des Hommes Sanglants à être peinte de rouge et de noir, au couleurs du sang et de la nuit. Et elle était la seule aussi, à cause de ses dons de chaman, à n’avoir pas le droit de manger de la chair humaine, même si elle pouvait boire le sang des sacrifiés…
Le sang qui était censé contenir tous leurs pouvoirs et leur savoir… Oui, eh bien, elle était bien avancée, maintenant ! La vieille chamane de la tribu des Mousses savait le secret de la potion qui pourrait les guérir de la maladie qui avait déjà emporté la moitié du clan… Oui, mais ils l’avaient tuée avant de le lui demander, de toute façon, elle ne l’aurait sûrement pas donné, et malgré l’ingestion de sa chair et de son sang, son savoir secret n’était en rien entré dans les gens de la tribu, et encore moins en elle ! Et ce cauchemar horrible qu’elle avait fait, cette nuit ? Elle en frissonnait encore, dans ses fourrures, en attendant l’aube qui semblait ne jamais devoir arriver. Elle avait trop peur de se rendormir… Depuis que le Moussu était venu les attaquer pour délivrer les femmes de son peuple avec cet homme peint du sang de la terre comme elle, et une femme de nuit, tout comme un individu d’origine indéterminée et boiteux… Elle avait vu l’attaque de son refuge, mais avait préféré ne pas s’en mêler, elle pensait que les hommes du clan étaient suffisamment forts et nombreux pour les massacrer…Et les étrangers en avaient tué plusieurs ! Ainsi que trois femmes !

Aube.


Sitôt le jour levé, elle se lava hâtivement, refit sa peinture corporelle, remit ses bijoux et son pagne, et alla voir le chef du clan, son père. Elle lui expliqua sa vision de la nuit, et son père se fâcha, la menaçant de mort si elle osait à nouveau proférer de telles insanités, professer une telle hérésie… Oui, mais avec ce qu’elle avait appris cette nuit, elle ne pouvait plus rester dans ce clan… Si elle parlait, elle risquait sa vie, désormais, elle le savait, alors, elle prétexta la nécessité de ramasser quelques simples pour ses potions et une retraite méditative afin de pouvoir s’éloigner du clan sans attirer l’attention et en emportant quelques affaires et une bonne couverture.

Rencontre.



Elle s’éloigna vers le Sud. et marcha de longues journées sans voir quiconque. Et alors qu’elle voyait une maigre forêt à l’horizon, elle se retrouva encerclée par des chasseurs fort peu avenants, dont trois grandes brutes ricanantes à l’air mauvais. Celui qui les menait avait les cheveux en queue au sommet de son crâne long et bas, et des yeux pâles comme la glace hivernale et tout aussi froids.
Le second avait une crinière de lion, dotée de la couleur fauve du félin, et il rugissait au lieu de parler, quant au troisième, il était épouvantable ! Toute la moitié de sa tête était couturée d’abominables cicatrices, et il n’avait pas de cheveux sur cette moitié-là pour cacher un tant soit peu le désastre… Un peu en arrière venaient un autre chasseur, aussi brun que le meneur, et avec, comme lui, les cheveux attachés, ainsi qu’un tout jeune homme qui n’avait presque pas de barbe.
Mais le chef du groupe s’exclama à sa vue :
«- Tiens donc ! Qu’est-ce que c’est que ça, encore ? Tu as des bijoux d’un goût bien contestable, la Rouge ! d’un ton doucereux mais indiciblement féroce.
- Je suis Haraka, Celle-Qui-Sait ! Je suis du Clan de L’Aigle des Hommes Sanglants ! dit-elle, fièrement, fixant sans ciller l’homme.
- Les Hommes Sanglants ? Qu’est-ce que cela, encore ? Vous êtes la tribu qui fabrique les Cristaux de Chasse ? demanda l’homme, se penchant vers elle, fort peu rassurant.
- Mon Clan n’est pas celui-là. Celui des Cristaux de Chasse, c’est le Clan de la Lune, et ils sont nos plus terribles ennemis. Les Hommes Sanglants vivent sur le territoire voisin du leur, et à côté aussi de celui des Hommes Moussus, vers le Pays Sans Soleil ! dit-elle, désignant le Nord.
- Les Hommes Sanglants… À voir tes bijoux, je comprends pourquoi… Vous mangez les hommes, chez toi ? Eh bien, réponds ! fit-il, la saisissant entre ses grandes mains et la secouant rudement.
- Oui. Mais j’ai eu une vision… Mes Ancêtres m’ont dit que ce n’était pas bien de manger de la chair humaine… J’ai bien tenté de l’expliquer à mon père, le chef du Clan de l’Aigle, mais il m’a menacée de mort si j’osais dire une telle chose ! Alors, je me suis enfuie. Je ne peux plus vivre avec des gens qui font des choses horribles… Choses horribles que j’ai faites, moi aussi… Je veux juste traverser ce territoire en paix, je ne veux rien de plus ! fit-elle, tentant d’échapper à la poigne de l’inconnu.
- Ah mais non ! Mon clan manque de femmes. Tu tombes à pic, toi ! Tu n’es pas mal faite, tu n’as pas l’air bien vieux, et il me faut une compagne ! Tu appartiendras au Clan de l’Ours des Torses Rouges ! Je suis Feydda, fils de Mulghar et de Maabh, et je suis le chef de mon clan ! Alors ? Est-ce que tu veux bien devenir ma compagne ? insista Feydda.
- Mais… Mais enfin, non ! Je ne te connais pas ! fit-elle, soudain épouvantée.
- Eh bien, tu apprendras à me connaître, mais d’abord, tu vas me faire le plaisir d’enlever ces horreurs de bijoux et cette peinture affreuse ! Tu ferais presque peur, ma parole ! J’ai faille te passer ma lance en travers du corps ! dit Feydda, ironique.
- Ce sont les os des mères de mes mères, les chamanes qui m’ont précédée, et ils ont des pouvoirs ! Et en plus, je ne peux pas les rejeter comme ça… Ils sont sacrés ! protesta Haraka, se dégageant de la poigne rude de l’homme.
- Si les miens te voient arriver avec ça, ce sont tes os qui rejoindront ceux que tu portes, après que les hyènes et les vautours t’auront dévorée, femme ! Chez moi, on ne mange pas l’autre, non mais des fois, même si nous ne sommes pas forcément des tendres par ailleurs ! Non mais regarde-toi ! Je me demande bien quelles sont tes vraies couleurs, au départ, à toi ! Cette peinture ne t’arrange pas non plus ! Allez, va te décrasser dans cette rivière, là, et enlève-moi ça, tu pues pire que charogne, ma fille ! Une hyène te prendrait pour compagne, avec l’odeur que tu dégages ! déclara Feydda, méprisant mais néanmoins intéressé par cette étrange fille.
- Ce sont les couleurs sacrées du sang de la terre et de la nuit ! protesta Haraka.
- Certes. Et alors ? Tu peux néanmoins ne les porter que lors de certains moments, ou cérémonies, pas en permanence ! Ça gâche ! déclara Feydda.
- Mais qui te dis que je te trouve à mon goût, d’abord ? Et que je veuille te suivre avec tes hommes dont ce monstre hideux ? fit-elle, digne, désignant le gaillard à la tête lacérée.
- « Ce monstre hideux », c’est mon frère… Ce pauvre Gohour a bien plu à un léopard des neiges, il y a quelques années… Il faut dire qu’il m’embarrassait et que je le lui avais un peu offert, mais les Esprits n’en ont hélas pas voulu, et mon père a failli me tuer pour ça, alors que je voulais juste alléger la tâche de Mère ! Mais bon. C’est du passé, et Gohour n’ose pas m’en vouloir, des fois que je finirais ce que le léopard a commencé… déclara Feydda, cynique.
- Ah ben bravo ! Je viens peut-être d’une tribu de cannibales, mais nous ne nous assassinions pas sciemment entre nous pour gagner du prestige ou les Esprits savent quoi d’autre ! Mais tu es aussi affreux que ton âme, toi ! Oui, parce qu’en plus, contrairement à ce que tu crois, tu es très laid, et qu’il faudrait avoir les moyens de ses prétentions, non mais des fois ! déclara la jeune fille, sincèrement horrifiée !
- Femme, personne n’a jamais osé insulter ainsi Feydda fils de Mulghar et de Maabh du clan de l’Ours des Torses Rouges ! se fâcha soudain le jeune homme, blanc de rage.
- Et avec un caractère d’aurochs enragé, en plus, ça nous manquait ! Et tu crois que tu me fais peur, grand vantard ? ironisa-t-elle. Est-ce que par hasard, tu ferais partie de ces lâches qui frappent les femmes en croyant que c’est ainsi qu’on peut les mener ? Eh bien, avec moi, tu es tombé sur un os, parce que, toute cannibale que je suis à la base, dans mon peuple, on respectait les femmes, eh oui, et je vais t’apprendre, moi, qu’une femme, ça ne se mène pas du tout comme ce que toi, tu crois !».
Et alors que Feydda s’apprêtait à aligner l’insolente comme ses frères et lui alignaient régulièrement la vieille Maabh ou cette sotte sentimentale de Kushti, voire les autres femelles de son clan, il reçut une volée de coups de pied et de poing rapides assénés sur des points sensibles qui le laissèrent paralysé de douleur et parfaitement hébété, ainsi qu’écroulé plié en six, sur le sol ! Les deux frères tentèrent bien de s’interposer, mais elle les cueillit avec des coups de pied redoutables sous leurs mentons absents qui les étendirent pour le compte les bras en croix sur l’herbe rase ! Les deux autres chasseurs tentèrent bien de l’embrocher avec leurs armes, mais en des bonds prodigieux elle évita la pointe de silex de l’une et la pointe durcie au feu de l’autre, tandis que ses pieds et mains nus, eux, faisaient sauter les armes des mains des deux intrépides qui ne le restèrent pas longtemps eu égard qu’ils s’enfuirent à toute vitesse, comme si tous les Mauvais Esprits les poursuivaient !
Cependant, Gohour revint à lui, stupéfait, et ne se souvenant plus de rien, ou presque, quant à Huor, il était encore chez les Esprits à tenter de récupérer les siens, d’esprits…
Feydda, lui, toujours paralysé et gémissant, n’arrivait pas à se relever…

La suite demain !


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